mercredi 17 avril 2013

Ecuañol

En deux mois passés ici j'ai pu retrouver mon niveau d'espagnol d'antan, cependant j'ai toujours un peu de mal à comprendre les équatoriens, notamment ceux aux origines indiennes qui prononcent l'espagnol comme le quichua, la langue des indiens de la Sierra. Au delà de l'adaptation à l'accent, il y a quelques originalités par rapport à l'espagnol d'Espagne, parfois spécifiques à l'Equateur et parfois communes à d'autres pays d'Amérique latine. En voici quelques exemples:

Cool: Le mot le plus cool que j'aie entendu ici, voire dans tous les pays hispanophones que j'ai visités, eh bien c'est justement le mot pour dire "cool" et qui est "chevere". A prononcer en espagnol c'est vraiment agréable, ça colle parfaitement avec l'état d'esprit dans lequel on se trouve quand on a envie de dire que quelque chose est cool. Quand on a fini de le prononcer il nous reste comme un demi sourire sur la bouche, qu'on peut prolonger comme pour dire "ouais mec! je surfe une bonne vague là tu vois!". Bon j'en rajoute un peu mais sans blague c'est vraiment un mot que tout le monde adore, dès que tu l'entends tu ne penses plus qu'à essayer de le placer, j'en ai parlé avec d'autres étrangers et on est tous d'accord là-dessus.
 
Vouvoiement: Comme dans beaucoup d'Amérique latine et à l'inverse d'en Espagne, le vouvoiement (Usted) est très utilisé en Equateur. Le tutoiement est réservé aux personnes familières, il est très grossier de tutoyer une personnes qu'on voit pour la première fois, ou de laquelle on n'est pas particulièrement proche. Comme en espagnol le vouvoiement existe aussi au pluriel (Ustedes), il faut faire très attention avant d'employer la seconde personne du pluriel (vosotros), et de fait on ne l'entend quasiment jamais.
 
Formules: Il y a évidemment de nombreuses formules typiques de l'Amérique latine, mais j'en retiens deux qui sont assez révélatrices d'un passé de domination. Si je vous demande quelque chose et que vous n'avez pas bien entendu, vous me répondrez "mande?", c'est-à-dire "pardon?" mais littéralement "commandez?". De même si je vous demande quelque chose et que vous me répondez, je vous remercie et alors vous me dites "a la orden", c'est-à-dire "de rien" mais littéralement "à vos ordres". En français nous avons "à votre service" mais il s'emploie de façon beaucoup moins généralisée qu'ici. Je me trompe peut-être mais je pense que ces formules sont héritées de l'époque coloniale et de la soumission à celui qui exige.
 
Pote: Ca c'est important, chaque pays a son mot pour dire "mon pote", au Mexique c'était "guey", je l'entendais partout, ici c'est "pana". C'est aussi utilisé au Costa-Rica et au Venezuela, y'a pas mal de théories sur son origine, dont une serait qu'il viendrait d'une mauvais prononciation de l'anglais "partner". Je ne sais pas si c'est la bonne mais ça me semble crédible car cela s'entend aussi pour dire "partenaire" et les américanismes (plutôt qu'anglicismes) sont très populaires ici. Par exemple, pour dire "très" ils n'utilisent pas le mot espagnol "muy" mais "full", c'est assez bizarre d'ailleurs.
 
Gros mots: Ca aussi c'est très important, surtout celui qui traduit notre "putain!". Il y en a trois: "chuta!" et "pucha!" sont les plus modérées, ils seraient d'origine quichua et traduisent une déception, une surprise ou une lamentation de façon relativement polie. Attention à ne pas les confondre avec le troisième "chucha!" qui peut s'employer pour le même usage mais qui est extrêmement vulgaire, cela désigne aussi le sexe féminin. Moi évidemment j'utilisais les trois de façon aléatoire, avec même une petite préférence pour "chucha" que je trouvais mignon, jusqu'à ce que mes collègues outrés m'expliquent ma méprise.
 
 
Bon voilà pour ces considérations linguistiques, je sais pas si c'est intéressant pour les non-hispanophones mais dans ma vie quotidienne c'est vachement important, je dirais 50% du dépaysement réside dans le fait de changer de langue pour s'exprimer.

1 commentaire: