Inti Raymi

Ce week-end je suis allé fêter l'Inti Raymi (la fête du soleil) dans la communauté de Minas Chupa près d'Otavalo. J'avais été invité par le fils d'un des chamanes, qui travaille avec AVSF sur le projet de commercialisation en circuits courts. Je les ai suivis toute la journée de samedi dans la montagne sur des chemins difficiles mais somptueux. Ci-dessous quelques photos commentées de ce périple:

Chamane soufflant dans une conque.

Les conques avaient été apportées du Pérou par un des villageois. Pas vraiment traditionnel donc (surtout dans une région de montagnes à 200km de la mer), mais très ludique. J'en ai essayé une moi aussi, sans succès ou presque. J'ai soufflé comme dans un didgeridoo mais ça n'était visiblement pas la bonne technique.

Montée en file indienne (c'est le cas de le dire).

Nous somme d'abord allés nous recueillir et prier devant une pierre sacrée puis avons continué notre marche jusqu'au sommet d'une des montagnes des environs d'Otavalo. Promenade magnifique au niveau puis au-dessus des nuages, avec des vues impressionnantes (voir posts à venir).

Offrandes à la Pachamama.

On distingue en bas à gauche un seau de chicha, boisson à base de maïs qui peut se boire avant fermentation (comme ici) ou après. En bas à droite du "mote", une variété de maïs qui se mange bouillie, avec quelques morceaux de porc. Au centre du cuy, des fruits, des biscuits et même des bonbons. Plusieurs autres plats: poulet et riz, maïs en épis ("choclo"), grillé ("tostado"), etc.

Prière au (dieu?) soleil.

Le célébration de l'Inti Raymi a été relancée dans la seconde moitié du XXè siècle avec l'émergence d'un intérêt nouveau pour les culture pré-colombiennes associé à la volonté des pays latino-américains de revendiquer une identité historique antérieure à la colonisation espagnole. Il est donc fêté un peu partout et un peu n'importe comment, c'est-à-dire que chacun le célèbre comme il veut. Par exemple, pendant la cérémonie les chamanes ont mélangé prières païennes en quichua et prières chrétiennes en espagnol.

On mange les offrandes.

Une fois la cérémonie terminée nous avons mangé les offrandes qui avaient été apportées. J'ai trouvé ça vachement bien, ça aurait été complètement débile de gâcher toute cette nourriture, surtout dans une région où tout le monde ne mange pas toujours à sa faim. De même un lapin vivant avait été amené pour l'offrir à la Pachamama, et au lieu de le saigner comme je l'imaginais ils l'ont simplement relâché. Il s'est sûrement faire choper par un renard le lendemain mais c'était sympa de le voir s'en aller tranquillement. C'est une conception de l'offrande sans sacrifice qui me semble beaucoup plus cool que celle (par exemple) d'un Dieu qui demanderait à un homme de tuer son fils pour lui prouver sa fidélité (n'importe quoi!).

Etape (et collation) dans une école.

Après la cérémonie sur la montagne, nous sommes allés dans une école où nous avons déposé nos bagages et nos victuailles. Une collation a été organisée dans une des salles de classe, donnant lieu à beaucoup de discussions et beaucoup de blagues. Je n'ai rien compris car tout était en quichua, d'ailleurs ça a été le cas pendant tout le week-end, dans ces cas là il faut accepter de ne pas pouvoir participer et se contenter d'observer. Je pense que si je devais vivre plus longtemps en Equateur j'essaierais d'apprendre le quichua, car dès qu'on s'enfonce un peu dans la campagne les gens parlent à peine l'espagnol.

Danse dans le cour de l'école.

L'étape suivant était une marche d'1h30 environ pour nous mener à une cascade. Avant d'entamer la descente les chamanes ont lancé une petite danse rituelle. Il y en a eu tout au long de la soirée et de la nuit, toujours lancées à l'improviste: un musicien commence à jouer un air très simple et très rythmé, et des danseurs le rejoignent et tournent autour de lui en tapant des pieds (très basique). Sur cette photo (comme sur celle du chamane avec la conque) j'ai essayé l'effet "miniature" de mon appareil, il faut maintenant que j'apprenne à l'utiliser à bon escient. Malheureusement je n'ai pas pensé à les filmer.

Épreuve des orties sous la cascade.

J'avoue avoir été plutôt déçu par l'épisode de la cascade. Je m'attendais à une super cascade avec des bassins pour se baigner tous ensemble (j'avais pris mon maillot de bain et ma serviette!), mais pas du tout. Déjà on a pris un chemin impossible, ou plutôt on a creusé un chemin à la machette dans la broussaille épineuse et en pente abrupte. Ensuite c'était une toute petite cascade sans bassin ni rien, et alors les mecs ils ont fait n'importe quoi: d'abord ils se sont bourré la gueule comme des malades, ils se sont foutus en slip pour se coller sous la cascade avant de se fouetter avec des orties et de se doucher avec ce qui restait de gnôle. Moi je suis reparti avant eux, d'une pour éviter d'être pris par la nuit et  de deux pour remonter le chemin hyper mauvais avant qu'ils ne me le labourent, d'ailleurs je me demande bien comment ils ont fait pour tous rentrer dans leur état.

Fabrication de flûtes.

Une fois que tout le monde est remonté nous avons attendu qu'un camion (une bétaillère en fait) vienne nous chercher à l'école et nous ramène à Otavalo, ce qui a laissé le temps à tout le monde de dégriser. Je suis allé à l'arrière, le trajet était on-ne peut-moins confortable mais c'était vraiment super de se retrouver debout dans une bétaillère avec 20 indiens, à traverser des paysages de montagne éclairés par la pleine lune, c'est pour ce genre de moments là que j'aime voyager. Ensuite j'ai dormi (sur une paillasse, ouïe!) chez le père de mon collègue, un chamane musicien qui vit notamment de la vente des flûtes qu'il fabrique chez lui.

Voilà c'était vraiment super comme week-end, c'est exactement comme ça que je voulais fêter l'Inti Raymi. J’étais dans la montagne avec les villageois qui faisaient juste la fête, en mélangeant un peu tout sous le chapeau "Inti Raymi" mais de façon complètement sincère. Cent fois plus authentique en tout cas que les grandes cérémonies chorégraphiées style "Puy du Fou" organisées à Quito ou Cuzco. J'ai pris un tas de photos, je vais continuer d'en mettre dans la semaine.